Ces matières dont les rêves sont faits
Maria Papa Paolo Valle et Caroline de Boissieu , dans cette exposition intitulée Signes et matières, déploient un éventail de créativité fondé sur la mise en valeur de matières très diverses : terre, céramique, marbre, métal, verre, plexiglas.
Le vénitien Paolo Valle forge une œuvre forte et diversifiée, qui tient à la fois du classicisme et du baroque, créant des céramiques aux motifs singuliers, puissants et colorés, dans un entrelacs de courbes noires, créant un langage calligraphique. Il construit des mappemondes insolites, anime de motifs lumineux les transparences du cristal de Murano. On retrouve dans ses peintures rythmées et fortement structurées le même jeu de motifs, de signes, un langage artistique qui lui est propre. Il y a de la sculpture dans sa peinture. Le passage d’une matière à l’autre lui permet de donner de la profondeur à son travail de peintre et sa maîtrise de la peinture anime ses céramiques et ses sculptures. Dans cette large gamme d’expression créatrice, une profonde cohérence s’exprime à travers l’originalité des multiples facettes de son talent.
Maria Papa, elle aussi, a aimé et travaillé la terre cuite. Tout au long de sa vie elle n’a cessé de dessiner et de peindre. Chacune de ses sculptures était dessinée, faisait l’objet d’une ébauche sur papier. Sa rencontre avec le marbre, à Pietrasanta, près de Carrare, où Michel Ange puisait sa matière de prédilection, fut un coup de foudre, un tournant dans sa vie. Dès lors elle décida de se partager entre la France et l’Italie, pour s’installer finalement près de la marbrerie Henraux. Son œuvre s’inscrit dans le marbre, qu’elle savait humaniser, auquel elle a su conférer une chaleur et une sensualité singulières. Architecte de formation elle sut mettre à profit ses qualités de mise en espace, son sens des proportions et sa connaissance technique de la matière. Elle choisissait des marbres italiens, syriens, portugais, africains, belges avec un soin infini. Elle travaillait en taille directe, suscitant l’étonnement et l’admiration des ouvriers. Son œuvre s’inscrit dans la lignée de Brancusi, Arp, Poncet, Gilioli, et Miro. Depuis ses premières sculptures en terre cuite, exécutées à Albisola, évocatrices de l’art brut, jusqu’à la puissance de ses œuvres monumentales en marbre, par l’élan et l’harmonie de ses pièces moyennes ou petites, en marbre ou en bronze, sa créativité a marqué chacune des matières auxquelles elle a insufflé la vie.
Caroline de Boissieu a choisi de partir de la photographie. S’ensuit un cheminement artistique original qui repose sur l’association de matières et d’éléments complémentaires. « Ma trame est la photo », déclare-t-elle … « l’eau est mon guide », puis vient la peinture, appuyée par la craie et enfin le plexiglas. Portée par la force du cliché initial, témoin d’un espace de la mémoire, elle suit la voie d’un élément naturel, l’eau, avant de le transformer en œuvre picturale fluide, renforcée par la craie et mise en transparence par le plexiglas. Ainsi s’articule une création qui laisse une part à des métamorphoses et qui est mise en lumière par des effets de reflets et de miroirs.
|