COMME DES BETES

Extrait d’un texte de Christian Besson à l’occasion de l’exposition
« comme des bêtes » 1999

….une corne déchire la toile.

Elle laisse une belle coulée de blessure violette.

La bête est passée, rapide et l’esquive l’a précédée ;

La peinture n’a pas eu le temps de coaguler et la balafre saigne encore.

La pointe a porté son estoquade en plein jaune pour démentir le rouge.

…La peinture emplissait déjà , à la fin des années quatre-vingt,

Les grilles dont Annick David structurait ses tableaux. Un remplissage peu sage, tant la peinture refusait de se laisser contraindre par le contenant, tant elle débordait de tout part.

…Résumons. Cette peinture est du Sud, terreuse comme un jardin de senteur,

Rouge comme une estafilade. Elle se moque des grilles mal léchées. Les thèmes font du coq à l’âne.

La bête donne à la peinture sa poétique : débordante

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ETAT DES LIEUX 14 avril 2009

Monde d’aujourd’hui, Monde de demain ? Traces du passé

Les Femmes d’aujourd’hui, la nature d’aujourd’hui autant de sujets d’actualité transposés par l’artiste dans des reportages picturaux où sont posés les problèmes des disparités et des disparitions qui caractérisant le monde.

Coloriste contrariée par la noirceur du monde, son travail s’inscrit dans une dynamique qui redonne vie à la nature que l’homme a pollué mais qu’il transmet à travers le temps par la conservation des œuvres picturales : c’est le chemin qu’Annick David parcourt à la recherche des prises de consciences transposables sur la toile qui peuvent parquer un tournant salutaire et un message d’espoir.

Pour la coloriste les pots sont un prétexte pour donner une libre expression à son goût des innombrables possibilités de la monochromie ou de la juxtaposition des couleurs. L’inspiration est puisée dans l’imaginaire ou dans la nature qui parfois de façon fugace est la palette la plus étendue que le peintre a sous ses yeux pour saisir l’instant sur la toile. Cet instant n’est pas visible par tous, seuls les poètes et les peintres sont capables de nous les transmettre soit de façon littéraire comme Rimbaud soit sur la toile comme beaucoup de peintres contemporains dont les formes et les couleurs ne sont pas la photographie du réel mais l’interprétation d’un coucher de soleil, d’un ciel d’orage ou d’une mer agitée.

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POINTS DE VUE

Texte écrit par Jean-Philippe Vienne, Directeur de l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts de Dijon . Dijon 2000

La peinture est précisément la question d’ANNICK DAVID : vases, pots, corridas, palmiers , fleurs, tout semble pour elle occasion de manifester la peinture, ses matières, ses grains, ses couleurs, ses gestes, ses répétitions, ses explosions, ses fissures, ses débordements….l’énumération pourrait ne jamais finir. Pourtant, sa méthode est plus exigeante : si chacun des motifs qu’elle engage est un prétexte à la peinture et à ce titre, pourrait être abandonné pour un autre, chacun d’eux n’est abandonné précisément qu’après une longue exploration de ses potentialités. Pour Annick David, la peinture « e cosa mentale » : elle ne peint pas sur motif. Elle peint l’idée du motif, ce que l’ombre sur la paroi de la caverne lui propose comme une occasion de la peinture, en quelque sorte une peinture d’occasions – mais avec un s – pas une peinture neuve, mais une peinture à chaque fois ressourcée de la nouvelle occasion qui en autorise la production. Ce sont ici des fleurs. La question n’est pas de les représenter, mais de savoir qu’entre les fleurs et la peinture des analogies formelles autorisent des passerelles et des ponts susceptibles d’engendrer ce plaisir extraordinaire qui est celui de la reconnaissance de l’évidence : comme si, parce qu’on pouvait avoir un bref instant l’illusion que la peinture n’avait jamais existé que pour dire les fleurs, parce qu’on avait déjà eu l’illusion, un peu avant, qu’elle n’avait jamais existé que pour dire les pots, on se trouvait tout à coup investi de la certitude qu’elle pouvait tout faire.